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Having no tombs to visit, members and relatives of Families of Victims of Enforced Disappearance and other human rights groups hold the Daupang Palad, the groups traditional All Soul's Day commemoration at Bantayog ng mga Bayani grounds in Quezon City on November 2, 2018.Daupang Palad seek to contextualize from a human rights lens the martyrdom and heroism of the dissapeared in the current national situation. "As we celebrate the lives of our beloved desaparecidos, who fought for the rights and welfare of the poor and marginalized, we become more acutely aware of the imperative od sustaining the struggle for this cause" said Nilda L. Sevilla FIND co-chairperson and sister of disappeared labor. Photo by Maria Tan/Rappler

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Conseils et ressources pour enquêter sur les personnes disparues et le crime organisé

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Des millions de personnes disparaissent chaque année, selon la Commission internationale des personnes disparues, et le crime organisé est responsable de nombre de ces disparitions. Le trafic de drogues, mais aussi la contrebande d’espèces sauvages, le pillage des ressources naturelles ou encore la traite d’êtres humains sont au cœur de nombreuses disparitions.

Sous sa forme la plus avancée, le grand banditisme est transnational, hautement organisé et souvent systémique. C’est une réalité quotidienne, qui infiltre toutes les structures essentielles au bon fonctionnement d’une société. Les disparitions sont souvent un effet collatéral de cette activité criminelle.

Quand les autorités sont corrompues, les enlèvements peuvent ne pas faire l’objet d’une enquête, ou seulement d’une enquête très sommaire. Les autorités nationales ou régionales reçoivent parfois des pots-de-vin, ou sont dans l’incapacité d’accéder aux informations dont elles ont besoin en raison du pouvoir et de la portée des groupes criminels. Il en va de même pour les enlèvements par l’État, où une personne est enlevée, secrètement emprisonnée voire tuée, puis la dépouille cachée par le gouvernement ou par des personnes agissant en son nom. 

Les disparitions peuvent prendre différentes formes, allant de cas isolés à des enlèvements de masse et à de multiples affaires liées les unes aux autres sur une période donnée. Sans oublier les personnes qui décident de disparaître elles-mêmes.

Les journalistes jouent un rôle important, en dissuadant ce type d’agissements criminels et en enquêtant, au profit du plus grand nombre, même là où l’État et l’État de droit se sont effondrés. Mais les risques encourus sont considérables et les journalistes ne sont pas à l’abri du danger quand ils enquêtent sur ces crimes.

Ils doivent donc rester vigilants au cours de leurs enquêtes. Ci-dessous, vous trouverez quelques études de cas et des exemples d’enquêtes qui ont été publiées sur ce sujet, des organisations utiles, et des conseils pour enquêter.

Table des matières

Études de cas

Voici une sélection d’articles récents sur les enquêtes concernant des enlèvements :

Voici quelques reportages en Amérique latine susceptibles d’intéresser les hispanophones:

Organisations et guides utiles

Conseils pour enquêter

Connaître la région

Lorsque vous travaillez sur un cas particulier, il est important de vous familiariser avec le lieu concerné, à la fois pour évaluer les risques que vous encourez et pour comprendre à quel type de crime organisé vous pourriez avoir affaire. Commencez par rechercher des cas similaires, échangez avec des experts qui ont travaillé dans la région, effectuez des recherches dans les médias et étudiez le fonctionnement des groupes criminels sur place. 

Ne vous rendez pas dans une zone dangereuse sans contacts de confiance ni plan réaliste pour vous sortir de là au plus vite, au cas où cela s’avère nécessaire. 

Une manifestation au Mexique réclamant des informations sur le sort de personnes disparues. Photo : Marcela Turati.

La sécurité

Votre sécurité et celle de vos sources doit être la priorité absolue lors du lancement d’une enquête sur le crime organisé. Il vous faut préparer un protocole en matière de sécurité. D’abord, en pensant au type d’enquête que vous souhaitez réaliser et en vous demandant si vous êtes la bonne personne pour réaliser ce travail.

Ensuite, en décidant comment stocker les informations recueillies et comment communiquer avec votre équipe et vos sources en toute sécurité. Ne vous déplacez pas avec des informations sensibles sur votre ordinateur ou votre téléphone. Chaque fois que vous vous déplacez, assurez-vous que votre équipe sait où vous vous trouvez et comment émettre une alerte si vous êtes en danger.

Il est important de rester en contact avec vos sources après la publication de votre enquête, car elles sont vulnérables et pourraient être ciblées en raison de votre travail. Faire équipe avec des experts, dont des ONG, peut vous aider à protéger vos sources et à décider quelles informations publier et quand. De manière générale, omettez les informations personnelles qui peuvent mettre en danger vos sources ou rendent possibles des attaques visant leurs amis et leurs proches. Soyez particulièrement prudent avec les photos et les vidéos qui peuvent révéler par inadvertance l’identité de vos sources et où elles se trouvent. Les vêtements de la personne interrogée ou les métadonnées de vos images peuvent révéler ce genre d’informations.

Les sources

Comme pour toute enquête, commencez par identifier des sources afin de commencer à reconstituer ce qui s’est passé. Les pistes d’enquête peuvent provenir : 

  • De reportages dans les médias
  • De dossiers judiciaires
  • De demandes d’accès aux documents administratifs
  • De témoins
  • D’ONG
  • D’avocats
  • De la police 
  • De la famille et des amis de la personne disparue

Dans la plupart des cas, les proches des personnes portées disparues auront des informations sur les réseaux criminels actifs dans la région et comprendront le fonctionnement des gangs locaux. Il arrive que les proches omettent ou cachent des informations pour protéger la personne disparue, mais votre enquête doit recueillir autant d’informations que possible. Bien que la famille et les amis de la victime soient des sources inestimables, il est important de garder un regard critique et de vérifier ce qu’ils vous disent. 

  • D’autres sources locales

Ceux qui ont déménagé hors de la zone concernée par votre enquête peuvent être plus disposés à vous parler, le risque pour eux étant moins immédiat. Une carte de vos contacts et de vos sources peut vous être utile. Les détenus peuvent également être des sources précieuses, car certains d’entre eux ont une expérience directe des réseaux criminels sur lesquels vous enquêtez. Les informations qu’ils vous fournissent doivent toujours être vérifiées. 

  • Les réseaux sociaux

Les réseaux sociaux peuvent souvent aider à retracer les déplacements et les activités des personnes, y compris de la victime et de tout suspect lié à l’affaire. Ils peuvent également vous éclairer sur les activités criminelles dans la région. Les réseaux sociaux sont un bon moyen de vérifier les informations obtenues auprès de vos sources.

Une peinture murale dans une ville rurale de la Colombie marque la Journée internationale des disparus. Photo : Laura Dixon.

Recherchez des indices sur le terrain

Dans certains cas, les personnes portées disparues peuvent laisser des indices concernant leur propre disparition sur les réseaux sociaux. Il peut être utile, surtout dans les cas liés à l’esclavage ou au trafic d’êtres humains, d’interroger la famille et les amis sur les dernières personnes avec lesquelles le disparu a interagi. 

La géolocalisation du téléphone portable ou de tout autre appareil mobile de la personne disparue peut grandement vous aider. Ses données bancaires ou l’accès à ses comptes sur les réseaux sociaux peuvent également révéler où se trouve la personne, ou en tout cas donner des indices vous mettant sur la bonne voie. 

Dans certains cas, il peut être utile de publier vos premières trouvailles afin d’attirer de nouvelles sources. Mais n’oubliez pas que cela comporte aussi des risques, puisque votre enquête sera alors de notoriété publique.

L’analyse des preuves

Une dépouille peut être découverte par les autorités ou d’autres groupes au cours de votre enquête. Il est impératif de vérifier s’il s’agit de la personne sur laquelle vous enquêtez. Même si le corps porte les mêmes vêtements et a les mêmes tatouages, ​​ou avait sur lui les bons documents d’identité, il est possible qu’il s’agisse d’une autre personne : deux personnes peuvent avoir des caractéristiques physiques semblables ou échanger des vêtements et des pièces d’identité. Dans l’idéal, vous disposerez d’une identification médico-légale avant publication. 

Dans de nombreux pays, l’enquête de police n’est pas fouillée et le bureau du procureur n’a ni les moyens ni la volonté d’enquêter. Les autorités ont rarement des laboratoires à leur disposition pour réaliser des analyses ADN et manquent souvent de formation pour gérer ces dossiers complexes. Si une enquête médico-légale est faite, essayez de faire vérifier ses conclusions avec un autre expert. 

Méfiez-vous de toute preuve et de toute analyse médico-légale provenant des procureurs et des enquêtes étatiques. Des conflits d’intérêts ou des pots-de-vin pourraient en fausser les conclusions. 

Travailler avec les autorités

Les journalistes doivent parfois se méfier des autorités, en gardant à l’esprit qu’elles pourraient être de mèche avec les criminels. Faites de votre mieux pour déterminer si c’est un risque dont vous devez tenir compte au cours de votre enquête. Si les autorités sont corrompues, vous ne devriez pas les tenir informées de votre travail. Comme pour toute source, vérifiez ce qu’elles vous disent. Des demandes d’accès aux documents administratifs peuvent vous aider en cela. 

Dans certains cas, au contraire, les autorités peuvent vous être extrêmement utiles. Veillez également à ne pas publier d’informations qui puissent compromettre une enquête de police ou mettre davantage en danger la personne disparue. 

Photo : ICMP.

Enquêter en tenant compte de traumatismes

Ces enquêtes portent sur une ou plusieurs disparitions. Il faut garder cela à l’esprit quand vous échangez avec les proches des victimes, en faisant attention au vocabulaire que vous employez. Si la famille pense que la personne est encore en vie, ne parlez pas d’elle au passé.

Rien de mieux que l’honnêteté et la transparence pour établir une relation de confiance avec la famille. Les journalistes doivent révéler dès leurs premiers échanges avec la famille s’ils parlent à d’autres sources – y compris des criminels présumés ou des membres de gangs – pour que la famille sache à quoi s’attendre. Il est important de tenir la famille informée, mais ne partagez pas d’informations non vérifiées, puisque cela pourrait leur donner de faux espoirs. 

Si vous êtes en contact avec d’anciennes victimes du crime organisé, indiquez clairement qui vous êtes et ce que vous faites. Vous risquez de traumatiser à nouveau vos sources et, dans le pire des cas, elles peuvent entrer dans la clandestinité si elles se sentent en danger. Faites tout ce que vous pouvez pour éviter de mettre vos sources en danger. 

Gardez en tête les difficultés de telles enquêtes ; ne faites pas de promesses que vous ne pouvez pas tenir. Il est essentiel de comprendre comment interviewer les victimes avant de débuter votre enquête. Pour des conseils supplémentaires sur comment interagir avec des victimes et des survivants, veuillez consulter cette page de Dart Center, ou lisez les conseils pour interviewer les victimes et les survivantes de la journaliste mexicaine Marcela Turati.

Prendre soin de soi

La recherche de personnes disparues peut être pénible, décourageante et dangereuse. Il faut parfois fouiller des fosses communes, voir les dépouilles de personnes soumises à des sévices abominables ou échanger avec des victimes qui ont subi des tortures physiques ou psychologiques. 

Même les journalistes les plus chevronnées peuvent avoir besoin d’un soutien extérieur pour faire face au traumatisme et au stress que ces situations peuvent générer. Vous pouvez vous y préparer en établissant un réseau de soutien qui comprend vos collègues, vos amis et un bon thérapeute.


Ce guide a été réalisé par Hannah Coogans, assistante éditoriale à GIJN. Elle est titulaire d’une maîtrise en journalisme d’investigation de la City University et a précédemment travaillé comme chercheuse à Hong Kong spécialisée sur la criminalité et le trafic d’espèces sauvages, ainsi que sur plusieurs épisodes de l’émission d’investigation Dispatches sur la chaîne de télévision britannique Channel 4. Elle est basée à Londres.

Un grand merci à Marcela Turati pour son aide dans l’élaboration de ce guide. Marcela Turati est une journaliste d’investigation indépendante réputée pour ses enquêtes sur les personnes disparues, les enlèvements, les massacres de migrants, les fosses communes et les violences.

Ce guide a été initialement publié en septembre 2020 puis mis à jour avec des ressources supplémentaires en décembre 2020. 

Ce travail est sous licence (Creative Commons) Licence Creative Commons Attribution-NonCommercial 4.0 International

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