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Médias à but non lucratif : comment recevoir des dons

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Bien que les médias à but non lucratif aient le vent en poupe, nombre d’entre eux continuent de dépendre des dons conséquents de fondations, de particuliers fortunés, de gouvernements et d’organisations multilatérales pour se lancer, survivre et prospérer. Voici quelques conseils pour démarrer et faire prospérer une collecte de dons conséquents.

Les défis liés à la collecte de fonds varient considérablement d’un pays à l’autre. (Voir l’analyse de la Charities Aid Foundation pour davantage d’informations sur la philanthropie dans le pays qui vous concerne.) Il existe des différences locales et régionales notables en ce qui concerne la tradition philanthropique, l’environnement juridique et la disponibilité des fonds. Malgré tout, des sommes d’argent considérables sont disponibles et une campagne de levée de fonds intelligente et déterminée peut avoir un réel succès.

Lors du lancement d’une collecte de dons, n’oubliez pas que vous et votre média avez également quelque chose à offrir. Le célèbre industriel et philanthrope John D Rockefeller disait ainsi : « ne vous excusez jamais d’avoir demandé à quelqu’un de faire un don à une cause juste, pas plus que si vous lui donniez la possibilité de participer à un investissement de qualité. » Recevoir un investissement philanthropique est l’occasion de faire bouger les choses. En révélant des faits d’intérêt public, votre travail a un impact sur le monde ; en se joignant à votre média, vos donateurs s’associent à cela. Peu importe qui ils sont ou la taille de leur portefeuille, ils ne peuvent obtenir de tels résultats autrement qu’à travers vous.

Alors ne compliquez pas les choses. N’oubliez pas que les projets incarnés sont ceux qui ont le plus de succès, et que l’on ne reçoit aucun don sans en avoir fait la demande. Prenez les devants, persévérez et restez poli. Et surtout, lancez-vous ! La mise en place des relations nécessaires à une collecte de fonds fructueuse prend du temps !

Lisez également la présentation faite par Bridget Gallagher pendant la conférence IJAsia18, qui résume tout ce qu’il faut savoir en une page : les trois habitudes à prendre pour réussir ses demandes.

Identifier les perspectives

Comment trouver les donateurs qui pourraient s’intéresser à mon travail ?

FAITES USAGE DE VOS CONNAISSANCES

Utilisez vos compétences de journaliste pour rechercher qui pourrait financer votre projet. Encore une fois, cela prend du temps. Il s’agit d’abord de restreindre le champ des donateurs potentiels – institutionnels, particuliers, entreprises, etc. – susceptibles de s’intéresser à votre travail. Passez un peu de temps à sonder votre ville, votre région, votre pays et vos pairs afin de répondre aux questions suivantes :

Qui sont vos pairs ou concurrents ? Qui les finance ? Quelles autres organisations vos donateurs actuels soutiennent-ils ? Qui sont leurs donateurs ? Votre réseau peut-il vous venir en aide ? De quels liens disposent vos collègues, soutiens, amis et les membres de votre conseil d’administration ? Avez-vous cherché à obtenir leur soutien ?

GÉNÉRER DE L’INTÉRÊT

Pour les organisations à but non lucratif, il existe plusieurs groupes de donateurs potentiels :

Les grandes fondations privées, comme Open Society, Gates et Omidyar ; Les agences d’aide internationale financées par des gouvernements, telles l’USAID, les organes de la Commission européenne et l’ACDI suédoise ; Les ambassades occidentales (d’Europe du Nord et d’Amérique du Nord) dans les pays en voie de développement ou en transition ; Les particuliers fortunés et les fondations familiales.

Pour une vue d’ensemble des donateurs des secteurs public et privé actifs dans le financement des médias indépendants à travers le monde, consultez le chapitre sur le financement dans « Empowering Independent Media » du Center for International Media.

Le rapport « Empowering Independent Media » de la CIMA. Image : Capture d’écran

Il vous faudra établir des normes quant aux types de financement que votre organisation est prête à accepter. Certains médias à but non lucratif n’acceptent pas de contributions d’organes gouvernementaux, par exemple. D’autres se méfient des dons venant d’entreprises ou d’hommes d’affaires influents. En tant que média d’intérêt général, il vous faudra mettre en place une politique de transparence quant à l’identité de vos soutiens financiers.

Certaines ressources peuvent vous aider à hiérarchiser les différents types de donateurs dans le cadre de votre campagne de collecte de fonds :

Les donateurs du secteur public

Les États-Unis

Grants.gov est le meilleur portail d’informations sur l’octroi de subventions par le gouvernement des Etats-Unis. Vous pouvez y effectuer des recherches par catégorie et par agence. L’USAID et le Département d’État sont les principaux donateurs au sein du gouvernement américain pour le développement de médias internationaux. Les ambassades américaines peuvent également disposer de fonds pour des bourses de journalisme et en soutien aux médias indépendants dans les pays en voie de développement ou en transition.

L’Union européenne

WelcomeEurope est un site indépendant qui répertorie des centaines de subventions disponibles provenant de programmes gérés par la Commission européenne et l’UE.

La page des subventions de la Commission européenne est le portail officiel des subventions de la Commission européenne.

Les ambassades d’Europe occidentale, en particulier des pays du Nord, peuvent disposer de fonds de soutien aux médias indépendants dans les pays en voie développement ou en transition.

Les institutions multilatérales

Des organisations internationales accordent également des subventions, notamment la Banque mondiale et des agences des Nations unies telles le Fonds des Nations unies pour la démocratie et l’UNESCO.

De nombreux bailleurs de fonds du secteur public publient des appels à projets et annoncent publiquement des concours et des opportunités de financement ; en général ils ont également des exigences très techniques quant aux projets concernés. Les sites FundsforNGOS et Devex proposent des ressources pour apprendre comment fonctionnent les appels à projets ainsi que des conseils pour préparer au mieux sa candidature.

Les donateurs privés

Bien que la communauté philanthropique soit de plus en plus mondialisée, il convient de garder à l’esprit que de nombreux donateurs préfèrent soutenir des projets près de chez eux. Réfléchissez à votre réseau personnel et aux liens que vous pourriez avoir avec des philanthropes et entrepreneurs au sein de votre communauté avant de cibler des donateurs de plus grande envergure, comme ceux figurant dans The Giving Pledge et la liste Forbes Billionaires.

La liste Forbes des milliardaires 2018. Image : Capture d’écran.

Certains donateurs individuels peuvent donner à partir de fondations « familiales » ou de fonds à vocation arrêtée par le donateur, qui publient leurs priorités et les procédures qu’ils suivent dans le traitement de candidatures. La plupart des bailleurs de fonds institutionnels font des déclarations publiques qui peuvent également vous aider à adapter votre candidature à leurs centres d’intérêt. Examinez les sites de fondations en vous posant les questions suivantes :

Publient-elles une liste de leurs bénéficiaires actuels ? Indiquent-elles les montants de leurs subventions ? Soutiennent-elles la recherche ou se concentrent-elles davantage sur le service direct ? Indiquent-elles les dates limites pour déposer ses candidatures ? Acceptent-elles les demandes spontanées ? Ont-elles des liens avec des membres de votre conseil d’administration ou de votre personnel ?

Renseignez-vous sur leurs antécédents et la nature de leur travail. De nombreuses ressources permettent de connaître l’actualité du secteur de la philanthropie, parmi lesquelles :

The Chronicle of Philanthropy Foundation Center InsidePhilanthropy FundsforNGOs Alliance Magazine

QUID DES FONDATIONS QUI N’ONT NI SITE WEB NI PROFIL PUBLIC ?

Selon le pays dans lequel est basé la fondation, les lois en matière de transparence vous permettront d’en savoir plus sur les activités et les centres d’intérêt d’une fondation :

Aux États-Unis, les fondations sont tenues de déposer chaque année un formulaire (« Form 990 ») auprès des autorités fiscales. Ceux-ci sont disponibles gratuitement par voie électronique sur le site du Foundation Center et sur Guidestar.org et détaillent généralement les avoirs nets de la fondation, ses dettes, les subventions qu’elle reçoit, ses coordonnées (quelques points de contact seulement, dans la plupart des cas) et les noms de ses administrateurs et de son personnel clé. Au Royaume-Uni, la Charities Commission publie une base de données consultable gratuitement qui fournit des informations de base sur les avoirs, la gouvernance et les activités de chaque fondation. Le Foundation Directory Online est un service par abonnement (bien qu’il soit accessible gratuitement dans certaines bibliothèques et qu’il collabore avec le European Foundation Center) qui fournit des informations de base sur les fondations américaines et les subventions du gouvernement américain, ainsi que des informations plus limitées sur les fondations asiatiques. Le Centre européen des fondations propose également des liens vers d’autres listes de fondations et de donateurs, répertoriés par géographie et/ou par centre d’intérêt thématique.

Et après ?

Vous avez identifié quelques donateurs potentiels qui pourraient vouloir soutenir votre travail. Quelle est la prochaine étape ?

Résistez à l’envie d’envoyer par mail une longue proposition ou une lettre de candidature. Utilisez toutes les connaissances que vous avez acquises au sujet de votre donateur potentiel pendant votre phase de recherche pour créer un rapport avec celui-ci. Apprenez à le connaître et aidez-le à mieux vous connaître, en lui faisant comprendre comment il pourrait tirer profit d’une relation philanthropique avec votre média. N’oubliez pas : les fondations ne donnent à un projet que quand il est incarné par une équipe convaincante.

TENDEZ L’OREILLE

L’erreur la plus courante que commettent les organisations qui rencontrent un donateur potentiel pour la première fois consiste à ne parler que de soi. Engagez une conversation avec votre donateur potentiel, incitez-le se confier à vous. Qui d’autre soutient-il déjà ? Quels sont ses objectifs et sa stratégie ? Selon lui, qui d’autre fait du bon travail dans ce domaine ? Qu’est-ce qui fait défaut ?

RACONTEZ VOTRE HISTOIRE

Idéalement, ses réponses vous donneront quelques indices sur les aspects de votre travail et de vos projets qui sont les plus susceptibles d’attirer son attention, et sur lesquels vous devriez insister dans votre candidature. Mais que ce soit lors d’une réunion initiale ou dans une proposition écrite, il est important d’évoquer l’histoire de votre projet, dans un langage succinct, simple et sans jargon, et en répondant aux questions suivantes :

Pourquoi ce projet plutôt qu’un autre ? Quelles sont vos activités / quelle est la portée de votre travail ? Quels sont vos produits ? Qui compose votre équipe ? Quel public ciblez-vous ? Comment comptez-vous les atteindre ? Pourquoi maintenant ? Impact – quelles sont les finalités de votre projet? Que peut-il changer ? En quoi votre projet est-il unique ? Pourquoi vous ? Quelle légitimité avez-vous personnellement et en tant qu’organisation ? Pourquoi un donateur devrait-il vous faire confiance ? Quels succès passés démontrent votre capacité à réaliser ce projet ?

Vous devrez peut-être expliquer aux donateurs pourquoi les médias indépendants méritent leur soutien, sachant que le journalisme ne recueille que depuis peu des dons de bienfaisance. Montrez-leur des articles ayant impulsé des réformes ou mis fin à des abus de pouvoir. Vous pouvez trouver des exemples de ce type dans l’article « Global investigative journalism : strategies for support», mais les exemples les plus proches de vous peuvent être les meilleurs. Vérifiez également si les contributions aux médias à but non lucratif sont déductibles d’impôt dans votre pays. De nombreux gouvernements offrent aux donateurs un allégement fiscal quand ils financent une ONG ou une organisation éducative. Cela peut être une incitation importante, en particulier pour les donateurs individuels.

LE SUIVI EST PRIMORDIAL

Quel que soit l’issue de votre première réunion ou conversation, restez en contact. Intégrez les donateurs à votre projet ; écrivez-leur ; faites-leur voir les fruits de votre travail afin qu’ils soient conscients de l’élan et de l’impact de votre média. Le suivi peut prendre différentes formes :

Des mises à jour sur les succès, les récompenses, les nouveaux projets Des invitations à des événements, des activités ou des points presse « Peut-on candidater à nouveau ? » « A qui d’autre devrions-nous parler de ce projet ? »

SACHEZ CE DONT VOUS AVEZ BESOIN ET N’AYEZ PAS PEUR D’EN FAIRE LA DEMANDE

Avant d’entrer en contact avec un donateur, définissez les projets qui ont besoin de financement, ainsi que les montants requis. Libre à vous d’évoquer ou non vos besoins spécifiques lors des premières rencontres, mais prenez surtout le temps de créer un lien de confiance avec le donateur. Cela dit, le fait d’établir d’entrée de jeu le genre de don qui vous sera le plus utile vous aidera à privilégier les donateurs les plus pertinents, et à répondre aux questions qu’ils vous poseront forcément quant à vos besoins.

Le don n’est que le début

REMERCIEZ VOS DONATEURS LE PLUS SOUVENT POSSIBLE

Dans le meilleur des mondes possibles, lorsque vos recherches, votre persévérance et vos prises de contact auront porté leurs fruits, ne vous dites pas que la réception d’un chèque marque la fin de votre travail. Bien au contraire : le donateur qui a le plus de chances de vous soutenir à l’avenir est celui qui vous a déjà soutenu, alors continuez à entretenir vos relations avec vos donateurs actuels, restez en contact régulier avec eux et faites usage de leur réseau pour élargir le champ de vos connaissances dans le milieu philanthropique. Dites merci lorsque vous recevez un don, et en toute occasion par la suite.

Bonne chance !

Bridget Gallagher est la fondatrice et directrice du Gallagher Group, qui est basé à New York. Avec plus de 20 ans d’expérience dans la collecte de fonds, dont plus de dix ans dédiés aux médias, Bridget Gallagher travaille en étroite collaboration avec des organisations du monde entier pour rendre plus efficace leurs campagnes de collectes de dons conséquents. Elle se spécialise dans les médias qui souhaitent avoir un impact, les aidant à définir un plan de collecte de fonds, à identifier les meilleurs donateurs potentiels et à mettre en place les bonnes méthodes et habitudes qui leur permettront de se présenter sous leur meilleur jour et de nouer des relations fructueuses avec leurs donateurs. Vous pouvez la joindre sur Twitter, sur LinkedIn ou par e-mail.

Ce travail est sous licence (Creative Commons) Licence Creative Commons Attribution-NonCommercial 4.0 International

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